Départ et retour du fils, le messianisme de Raymond Abellio

Face à l’apparition et au développement des messianismes séculiers, notamment politiques, tout au long de l’époque moderne jusqu’à aujourd’hui, avec leur cortège de croyances naïves et de violences, il est bon de rappeler qu’il existe aussi un messianisme spirituel, dont l’objectif n’est ni sociopolitique ni historique.

Nous avons choisi d’exposer et d’analyser l’un de ces messianismes spirituels : celui qui traverse la pensée de Raymond Abellio. Ce livre montre qu’il est possible, à partir de l’annonce réitérée par Abellio de l’existence et du « retour » de ce qu’il nomme le « Fils », de mettre en lumière les dimensions messianiques de la gnose qu’il constitue. Nous défendons l’idée que ce messianisme – bien que le mot ne soit jamais employé par Abellio – n’est pas un simple aspect de son œuvre, mais l’assise spirituelle qui fonde tout son édifice gnostique. Il en constitue le vecteur intellectuel, la force éthique et esthétique qui inspire l’ensemble du corpus abellien.

Le « Fils », dans cette perspective, surgit du fond théologique et métaphysique de l’être. Son apparition et son « départ » engagent une dynamique qui touche à la fois chaque individu et l’humanité tout entière. Comprendre sa nature et, surtout, son « retour », dans la phénoménologie génétique et gnostique d’Abellio, c’est découvrir une dynamique transcendantale qui structure l’être et le devenir, et saisir l’enjeu universel qui en découle. Cette révélation trouve son opérativité dans la conscience transcendantale (l’homme intérieur) et sa germination dans la temporalité (l’historial).

Ce messianisme, particulièrement gnostique, postule que l’existence individuelle comme l’histoire collective se résolvent dans l’avènement intérieur de cette figure de réconciliation et d’exhaussement en l’intelligence universelle. Pour Abellio, notre époque – celle de sa vie et de la publication de ce livre – constitue le sommet eschatologique de ce processus. Sachons en lire les signes.